Sanctuaire de Sainte-Julienne de Cornillon

De l'adoration eucharistique à la Fête Dieu à Liège

L’histoire du sanctuaire de Cornillon

1 Le Mont Cornillon

Le Mont Cornillon est une colline au confluent de l’Ourthe et de la Meuse. De tout temps point  stratégique de défense de la ville de Liège, elle fut occupée, au cours de l’histoire, en alternance par des religieux et des militaires. Elle fait aujourd’hui partie de la ville de Liège, dominant son quartier d’Amercœur.


Illustration d’Amercoeur en 1649: À droite les quatre couvents de la maladrie de Cornillon, à gauche l’église Saint-Remacle au Pont et les Prémontrés

2 La léproserie ou le grand hospice de Liège

La léproserie de Cornillon nous est connue par un document de 1176, par lequel les échevins de Liège imposent un règlement à l’établissement : « la maison des lépreux de du Mont-Cornillon a été jusqu’à notre époque, dans une grande indigence : une pauvre habitation, peu de biens, de rares visiteurs. Mais Dieu, dont la Providence n’est jamais en défaut, a inspiré à quelques personnes de se donner, elles et leurs biens, au service des lépreux, pour venir faire leur salut au milieu d’eux. »
Il y avait donc, selon ce document, au pied du Mont Cornillon, une communauté de lépreux vivant misérablement de la charité publique. La lèpre gagne du terrain par transmission tout en évoluant avec une extrême lenteur. La solution est l’isolement forcé et ils s’établissaient près d’un carrefour ou d’un cours d’eau. Parfois, des familles entières venaient s’ajouter à la communauté.
Dans une charte de 1190, on apprend que Herman de Looz, ainsi que sa femme et leurs enfants, viennent se donner, avec douze bonniers d’alleu, à la léproserie de Cornillon, désireux de faire leur salut en vivant au milieu des malheureux. L’Eglise et des chrétiens s’occupèrent des lépreux isolés. Des papes prirent des léproseries sous leur protection puis les municipalités manifestèrent le souci de co-gérer ce qui devinrent les premiers hôpitaux publics.

3 Les quatre couvents

Le couvent-léproserie se composait de quatre communautés : les hommes malades et les hommes sains, les femmes malades et les femmes saines. Les quatre communautés vivaient sous la direction de deux prieurs, un homme (prêtre) et une femme, dans l’observance du célibat, du partage des biens et de la prière, sans posséder de règle religieuse fixe mais, comme l’écrit le contemporain Jacques Vitry : « les membres de la maison des quatre couvents n’omettent pas, autant que le leur permette les fonctions de l’hospice et le soin des infirmes, d’assister aux heures de l’office divin. Ils s’assemblent fréquemment en chapitre pour y corriger leurs fautes et régler les affaires nécessaires. ».

4 L’héritage de la petite Julienne

La situation financière de la léproserie s’améliora grâce aux dons de certaines personnes, en particulier la dot de la jeune Julienne, orpheline à l’âge de 5 ans accueillie par le couvent des sœurs. Elle arrivait avec une riche dot de 210 bonniers de terres situées à Retinne, soit environ 210 hectares. Cette dot contribua significativement aux frais de fonctionnement de la léproserie et de la communauté.
Combiné à d’autres donations et rentes, cet héritage faisait de Cornillon un des hôpitaux les mieux dotés du pays. Ses dépendances comptaient les fermes de Juprelle, Once, Lantin, les moulins de Jupille, de Longdoz, d’Ans ainsi que de nombreuses rentes possédées en ville.
Toutefois, cet héritage de Julienne confié à la léproserie suscita de la convoitise de la part de bourgeois et d’officiels, dont le nouveau prince-évêque Henri de Gueldre, plus prince qu’évêque, qui finit par faire fuir Julienne fin 1247 après le décès de son protecteur le prince-évêque Robert de Thourotte.

5 La vie de Cornillon du XII au XVIII siècle

A partir du départ de Julienne, l’administration de la maison de Cornillon fut gérée par des administrateurs élus par le conseil municipal, avec la présence d’un aumonier (« vicaire éternel ou inamovible ») rémunéré modestement pour gérer les « biens spirituels » de la maison. La charité des Liégeois n’a jamais rien laissé à désirer. Nous voulons simplement indiquer la place que la charité occupait déjà dans la vie de jadis. Lorsqu’un liégeois, malade ou blessé, ne pouvait, étant trop peu fortuné, appeler à son chevet un médecin, des gardes pour le soigner et l’assister, il pouvait se rendre dans un des nombreux hôpitaux existant en ville. Le plus important de tous était l’hospice de Cornillon. On ne recevait à Cornillon que des lépreux nés à Liège et baptisés dans les trois fonts, c’est-à-dire Notre- Dame-aux-Fonts, Saint-Jean-Baptiste et Saint-Adalbert. Les gens baptisés dans une autre paroisse devaient se faire soigner à la maladrerie située en dehors de la porte Sainte-Walburge.

Vers 1500, l’hospice souffrit d’une mauvaise gestion et d’un certain laisser-aller. Le prince-évêque Erard de la Marck intervint vigoureusement pour rétablir la paix et un mode de vie plus saine. Cornillon prit l’allure d’un béguinage assez paisible et la conserva, non sans l’intervention assez fréquentes des autorités. L’évêque intervint peu et seulement pour des questions religieuses.
La révolution française passa par Cornillon : pendant un demi-siècle la prière cessa de monter du haut de la colline abandonnée par les Chartreux et en-dessous les bâtiments déserts de Cornillon réclamaient leurs hospitaliers. Ensuite, les petites sœurs des Pauvres venant de France ont repris la chartreuse en soignant avec un dévouement sublime de malheureux vieillards.